La lune distillait son aura funeste sur le convoi qui filait à toute allure sur un petit chemin de campagne. Des cavaliers, dont les visages n’avaient rien à envier au gardien des enfers, le poursuivaient sans relâche depuis de nombreux kilomètres.
La respiration haletante des quatre chevaux de l’attelage, formant des volutes de brume dense, résonnait aux oreilles du cocher.
Dans la voiture, une femme aux yeux ambrés veinés de noir, tenant une enfant d’environ deux ans dans les bras, fixait avec effroi l’homme assit en face d’elle. Celui-ci, âgé d’une bonne trentaine d’années de plus qu'elle, tenait également un enfant du même âge endormit contre son cœur.
Azerwal, le père des enfants, avait le regard fixé sur la piste défilant sous les roues de son carrosse. Ses yeux s'écarquillèrent d'horreur en voyant le tronc d'un arbre mort en travers.
Les quatre chevaux franchirent l'obstacle sans aucun problème, ce qui ne fut pas le cas de la voiture qu'ils tractaient. Les roues de bois se brisèrent, envoyant une multitude de débris en tout sens.
Azerwal fut projeté violemment en avant et heurta un rochet de la tête. L'hémoglobine s'écoula depuis ses oreilles tout autour de lui, sous le regard bienveillant des astres nocturnes.
Passé les quelques secondes de désorientation dues au choc, les passagers se ruèrent à l'extérieur. La femme s'arrêta un bref instant devant la dépouille de son mari les yeux embrumés et le souffle court. L'homme l'accompagnant, serrant toujours le petit garçon dans ses bras, l'obligea à le suivre à travers les arbres denses de la forêt jouxtant le chemin.
Les larmes de l'olympienne coulaient le long de ses joues et venaient mourir sur le front de la petite fille qui dormait dans ses bras.
Leigh s'enfuyait à travers les bois laissant derrière elle le corps sans sépulture de son époux. Prise par la peur et sentant son dos en danger, elle courait de toutes ses forces, se coupant et déchirant les pans de sa robe par les nombreuses branches, protégeant au mieux sa fille qui ne semblait pas sortir de sa profonde torpeur.
Riess de Hastings filait aussi vite que sa fille, l'encourageant sans relâche. Mais une flèche mortelle stoppa net la course de Leigh. La fillette échappa aux bras inertes de l'olympienne et roula au sol sous un buisson.
Riess s'arrêta comprenant qu'il était déjà trop tard pour la chair de sa chair. Il chercha du regard la sœur du petit garçon endormit, mais l'épaisse couverture arboricole empêchait aux rayons lunaires de l'aider dans sa tâche.
Les hurlements des soldats se rapprochant de lui, couvraient les respirations de la petite fille profondément endormie, les subtilisant à son ouïe habituellement fine.
C'est le cœur serré et le regard infiniment triste que l'homme du se résoudre à partir au plus vite pour la survie du garçonnet.